Ayant entrepris un jardin potager familial en permaculture depuis plus ou moins un an, je lis pas mal de choses sur les méthodes de culture naturelles.
Le plus beau livre que j’aie pu lire sur le sujet est “La révolution d’un seul brin de paille” de Masanobu Fukuoka. Ce livre est bien plus qu’un livre sur l’agriculture.
Convaincu que nous ne pouvons isoler un aspect de la vie d’un autre, M. Fukuoka nous enseigne comment la santé tant physique que spirituelle de l’homme et la santé de la terre commence par la façon dont nous cultivons nos légumes et nos céréales. Il ne s’agit pas de simples considérations sur l’importance de manger “bio” et nous sommes loin des “bons conseils” du genre “éviter les sucres et la graisse”.
M Fukuoka nous montre un chemin de re-découverte de notre véritable lien à la nature et un art de vivre en harmonie totale avec elle. Un chemin où la spiritualité et la conscience de l’unité prend racine très concrètement dans notre assiette.
Masanobu Fukuoka, en (très) bref…
Microbiologiste de formation, M Fukuoka a très rapidement quitté son métier de “spécialiste en phytopathologie” pour consacrer sa vie à cultiver la terre. Il a développé un concept unique d “agriculture sauvage” dite aussi “agriculture du non-agir”. Je ne vais pas ici détailler en quoi ce type d’agriculture consiste. Ce n’est pas le propos de l’article. Sachez simplement qu’aujourd’hui, grâce à un mode pensée en totale communion avec la terre, la fertilité des champs de Fukuoka est devenue une curiosité qui attire les spécialistes du monde entier. De plus, il accueille dans d’humbles cabanes quiconque veut venir travailler sur ses terres et redécouvrir une agriculture, une alimentation et un mode de vie “naturels”.
4 types d’alimentation
Je voulais vous proposer de découvrir le point de vue de Fukuoka sur l’alimentation. Je le trouve très pertinent. Pour lui, il existe 4 façons de se nourrir.
1) l’alimentation “laxiste”
Alimentation “facile” et “vide” où les gens oscillent sans règles en réponse à leurs caprices et leurs fantaisies. C’est l’alimentation du remplissage d’estomac.
2) l’alimentation “standard”
C’est l’alimentation “matérialiste” ou “scientifique”. Les gens mangent tel ou tel aliment parce qu’il est riche en vitamines, riche en oméga 3, pauvres en graisse, sans sucre, … parce qu’il est dit “bon pour la santé”. C’est une alimentation très intellectualisée.
3) l’alimentation “de principe”
Celle-ci se base sur des principes spirituels et/ou une philosophie idéaliste (par exemple l’alimentation basée sur le système yin/yang ou l’ayurvéda, etc …). Ce type d’alimentation peut soutenir l’harmonie du corps. Mais en entrant trop profondément dans ces systèmes, on risque d’en faire des doctrines ou de la “science” et donc d’entrer finalement aussi dans un système “mental”, dans une forme de pensée discriminante qui a également ses limites.
Pour M. Fukuoka, l’alimentation “standard” et l’alimentation “de principe” ne sont pas un retour à la nature. Ces alimentations embrouillent l’esprit de règles et de principes, parfois compliqués, parfois même contradictoires, et qui éloignent seulement l’homme de la nature.
4) l’alimentation de non-discrimination ou alimentation “naturelle”
“Ne mangez pas votre nourriture avec votre tête. Débarrassez-vous de l’esprit de discrimination” M. Fukuoka
L’alimentation de non-discrimination est pour Fukuoka la seule véritable bonne manière de se nourrir. Lorsque l’homme vit en totale harmonie avec son environnement, la sensibilité qu’il développe permet à son corps de choisir lui-même sa nourriture.
Je le cite : “Quand la nourriture, le corps, le coeur et l’esprit s’unissent parfaitement dans la nature, une alimentation naturelle devient possible. Le corps tel qu’il est, suivant son propre instinct, mangeant si quelque chose a bon goût, s’abstenant dans le cas contraire, est libre. Il est impossible de prescrire les règles et les proportions d’une alimentation naturelle. Cette alimentation se définit d’elle-même selon l’environnement local, les différents besoins et la construction corporelle de chaque personne.”
Cette définition de la “bonne” alimentation rejoint de près celle du natha yoga. Lorsque le yogi investi dans sa pratique développe et purifie son énergie, la seule alimentation “correcte” est celle guidée par son intuition. Il n’est donc pas ici question de se mettre des “règles” alimentaires dictées par la pensée (le discours intellectuel, qui calcule ce qui est bien ou mal) mais bien de préférer la recherche d’une harmonie globale basée, ici dans le cadre de l’alimentation, sur la saveur et le goût des aliments.
L’homme au service de la nature
Pour Fukuoka, toute maladie trouve son origine dans une séparation avec la nature. Le problème aujourd’hui est que, lorsque l’homme veut retrouver son contact avec la nature, il n’a pas l’intelligence claire de ce que c’est. Il a oublié ce qu’’est la nature. Il agit, il réfléchit, il “essaie” de “faire” son retour à la nature, il “essaie” de retrouver une bonne alimentation. Mais il connait souvent un échec car son véritable ancrage à la terre n’est plus. Toute la philosophie et les démarches de Fukuoka vont dans le sens de permettre à l’homme retrouver ce contact, ce lien.
“Sers uniquement la nature et tout ira bien” . M. Fukuoka
Voilà une idée qui n’est pas forcément facile à appliquer dans notre vie contemporaine. Cependant, je crois que cela vaut quand même la peine, que nous soyons campagnards ou citadins, de lire au moins une fois ce livre et d’ouvrir sa conscience sur ses “principes”. Même s’ils ne sont sûrement pas tous applicables pour tout le monde, je crois qu’il est bon et vitalisant de les avoir quelque part dans un coin de la tête, de savoir que certaines personnes vivent cette vie simple, proche de la terre et y trouvent leur véritable harmonie. Je pense aussi que nous pouvons, chacun à notre niveau, transposer ces principes et, par des gestes ou intentions simples, retrouver le bonheur de “servir la nature”.
Bon appétit !